« Quand je fais les choses, j’y vais à fond », nous dit Farah dans un grand rire. Cette jeune femme de 24 ans, pleine d’enthousiasme, nous raconte dans un débit de mitraillette comment elle a plongé dans le grand bain du théâtre, il y a sept ans. « J’ai découvert le jeu théâtral avec Élodie Chanut, metteuse en scène de la compagnie L’Œil des cariatides installée à Nanterre. Elle m’a accueillie dans un atelier, et le théâtre a immédiatement été une révélation pour moi. »
Le théâtre comme échappatoire
À l’époque, Farah a 17 ans et vient de perdre son père qui a brutalement succombé à un cancer. « Ma mère m’a dit que je devrais essayer le théâtre pour extérioriser l’énergie en moi. » Le cours d’Élodie Chanut devient une échappatoire pour elle, une voie d’émancipation aussi. Après le bac, elle s’inscrit dans une licence de théâtre à la Sorbonne, puis suit une double formation de comédienne à l’école La Générale, à Montreuil, et au conservatoire de Nanterre. Désormais, ses semaines sont rythmées par les auditions, les rencontres avec des metteurs en scène, les tournages de courts métrages, et les soirées passées « avec les potes » dans les théâtres pour découvrir les spectacles dont tout le monde parle. Farah a grandi dans le quartier du Parc Sud. Elle confie que l’art dramatique ne faisait pas partie de la culture familiale : « On n’allait pas au théâtre, mais ma mère qui enseigne à l’école Elsa-Triolet mène de temps en temps un projet théâtre avec ses élèves. C’est d’ailleurs comme cela qu’elle m’a présenté Élodie Chanut. » Farah considère cette dernière comme son mentor. « C’est Élodie qui m’a montré la voie, qui m’a donné confiance en moi. »
Pour l'égalité, contre la violence
Depuis quelques mois, Farah joue dans une pièce qu’Élodie Chanut met en scène. Mon frère, ma princesse aborde les problématiques de genre et d’égalité fille/garçon. « J’incarne un garçon qui harcèle un autre petit garçon qui aimerait être une petite fille. Nous l’avons présentée au collège République et dans plusieurs écoles de Nanterre où nous avons eu de bons retours. En mars, nous jouerons à la Salle des fêtes dans le cadre du Printemps de l’égalité. » En ce moment, Farah est également à l’affiche d’une pièce autour d’un autre fait de société. « Dans Poings, j’interprète une femme sous l’emprise de son mari. Cette création, que j’ai montée avec des camarades de l’école de théâtre, évoque sans détour la violence conjugale.»
Transmettre sa passion
Entre deux représentations, Farah donne des cours de théâtre aux élèves de la compagnie L’Œil des cariatides. Chaque mercredi, elle transmet sa passion à des enfants et à des adolescents lors d’un atelier à la salle Le Corbusier à Nanterre. « J’adore intervenir auprès des jeunes, ils m’inspirent beaucoup, et on s’amuse énormément avec les textes que je leur propose de travailler sur le plateau. » La jeune femme encadre aussi un cours suivi par un public souffrant de handicap psychique. L’atelier, initié par la Ligue de l’enseignement, « l’enrichit considérablement ». Pour l’heure, le théâtre la nourrit, mais seulement au sens figuré du terme. Dans l’attente d’obtenir le statut d’intermittente du spectacle, Farah s’adonne à un job de serveuse, aux Batignolles, à Paris. « Un restaurant, vous savez, c’est comme un plateau de théâtre où j’incarne un personnage en mouvement devant un public ! »