Heureusement, petit, Armand n’aimait pas l’école ! L’enfant de Koudougou, au Burkina Faso, se rêve en footballeur puis en danseur. Il sèche souvent les cours et redouble deux fois : « J’étais un peu bandit », confie-t-il aujourd’hui avec malice. À l’adolescence, sa famille l’envoie en internat loin de chez lui pour apprendre la mécanique dans un centre d’éducation spécialisé. Mais c’est le cirque qu’il rencontrera : « La première semaine, il y a eu une cérémonie d’accueil avec une démonstration des élèves de l’atelier cirque. Je me suis dit : “Si je dois faire quelque chose, ce sera ça !” » Armand choisit l’acrobatie et se met aussi très vite à jongler.
Au début, avec trois citrons verts
Passionné, il se rapproche de ses professeurs de cirque, prépare leur repas, fait leur vaisselle, etc., mais il se remet à sécher. À la fin de l’année, la menace tombe : « On m’a dit : “Le cirque, ce n’est pas un métier. Si tu ne travailles pas en cours, tu arrêtes le cirque.” » Résultat : en deuxième année, Armand finit premier en mécanique et continue à s’entraîner comme un fou, avec trois citrons verts. Un soir, tard, un travailleur social de l’école l’aperçoit en plein jonglage. « Il ne croyait pas en moi car il trouvait que j’étais trop grand pour faire du cirque mais, ce soir-là, il a vu combien cela me tenait à coeur. Depuis, il m’a toujours soutenu, il est même devenu plus tard l’administrateur de ma compagnie. » Quant à sa famille : « Ils ont compris ma passion quand j’ai participé à l’émission L’Afrique a un incroyable talent [Armand a atteint les demi-finales]. Ils ont vu que j’avais la foi, le courage et l’envie. »
Balles, massues, bassines
À la fin de ses études, à 19 ans, Armand rêve de transformer sa passion en carrière. Il devient acrobate pour des compagnies de danse, et se produit beaucoup à Ouagadougou, la capitale, et à Bogo Dilasso, ville reconnue pour son festival des arts du cirque. C’est là qu’il découvre le plaisir de la scène : « Sur scène, vous êtes une autre personne […] et vous partagez votre véritable passion. Y’a rien de plus fort que de faire plaisir aux gens et de me faire plaisir. » (*) Il jongle avec des balles et des massues, et c’est seulement en 2016 qu’il convainc l’un de ses anciens professeurs de l’initier au jonglage de bassines. Un an plus tard, c’est un numéro avec dix bassines qu’il présente à la télévision ! En 2018, il rencontre la circassienne américaine Erin Stevens lors d’une compétition de jonglage au Bénin, et lui confie son rêve : créer une école de cirque professionnelle. Cela n’existe pas dans son pays. En 2020, tous deux fondent la compagnie Yennega Circus, du nom d’une princesse mandingue. Depuis, Armand s’occupe de la direction artistique de sa compagnie, il milite pour la présence de femmes dans le cirque, traditionnellement plus masculin au Burkina, et cherche des financements pour son projet d’école.
Avec les Noctambules de Nanterre
Depuis 2019, il s’entraîne au mât chinois grâce aux stages proposés par Les Noctambules lors du festival Rendez-vous chez nous de Ouagadougou, soutenu par le festival Parade(s) : « Pour créer une école de cirque, il faut pouvoir tout enseigner ! J’étais le plus motivé des élèves alors on m’a confié le mât que j’ai installé dans ma cour. Je m’entraîne la nuit, c’est plus inspirant… » Depuis le 19 mai, il travaille un numéro de mât à Nanterre avec les Noctambules et co-anime des ateliers pour les enfants nanterriens : « Le cirque demande de la concentration, de l’écoute, du travail. Il m’a beaucoup calmé, beaucoup donné, beaucoup changé. Je rêve d’apporter cette passion et cette inspiration dans la vie de beaucoup d’autres. »
(*) Extrait de l’article publié sur le site de l’Association internationale de jonglage.
Découvrez le spectacle d’Armand: le vendredi 3 juin à 18h45 (parvis de la Maison de la musique) ; le samedi 4 juin à 14h45 et à 17h15 (parc des Anciennes-Mairies), le dimanche 5 juin à 14h45 (parc des Anciennes-Mairies) et à 18h30 (parvis de la Maison de la musique).