Quartiers

PLATEAU/MONT-VALÉRIEN

La place des femmes se discute en classe

Écrit par : Catherine Portaluppi

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Les élèves de seconde pro maintenance des véhicules auto-moto du lycée Claude-Chappe avec leur professeure principale, Johanna de Haro.

Injustices, inégalités de traitement au regard de la loi au cours des siècles, sexisme et éducation genrée, une classe de seconde pro découvre l’histoire des femmes, leurs combats et les vertus du débat.

« Des femmes ont été vendues sur le marché en Angleterre jusqu’en 1913 ! » « Simone Veil a sauvé indirectement plein de vies. » « Avant, les femmes ne pouvaient pas faire des études de médecine mais au XIXe siècle, une Anglaise s’est déguisée en homme pour devenir chirurgien… » Lorsqu’on demande aux élèves de seconde pro maintenance des véhicules auto-moto du lycée Claude-Chappe ce qu’ils ont retenu du projet « La place des femmes dans la société », la parole fuse. Ce projet, Johanna de Haro, leur professeure principale (lettres et histoire-géo), et Sophie Meignan, conseillère principale d’éducation, l’ont voulu après une mauvaise expérience l’an dernier. L’une des (rares) élèves filles de terminale en mécanique moto avait dû faire face aux remarques sexistes de son patron durant un stage et n’avait pas su quoi répondre. Les deux femmes élaborent alors six séances d’une heure, chronologiques et thématiques, afin de «  faire réfléchir les élèves à l’évolution de la place des femmes dans la société et dans les textes de loi », explique Johanna de Haro.

Apprendre et débattre

Chaque lycéen a d'abord choisi un thème pour l’article destiné au site internet : la place des femmes dans les religions, dans la Formule 1 ou la révolution des saris roses en Inde (mouvement féminin de lutte contre les injustices, monté dans l’Uttar Pradesh, une région pauvre du nord de l’Inde). Un élève prépare des affiches de statues de la Liberté version pop art à des moments clés de l’histoire. Les autres séances s’organisent autour de caricatures, de photos de manifestations pour l’IVG, pour l’égalité, ou encore de textes de loi. On découvre ainsi l’extrait d’un rapport préparatoire créant, en 1880, l’enseignement supérieur pour les jeunes filles, lequel explique qu’il faut, pour leur éducation, « choisir ce qui convient le mieux à la nature de leur esprit et à leur future condition de mère de famille ». Les discussions s’engagent très vite en classe, beaucoup s’indignent : « Seulement 3 % des violences sexuelles sont punies, ce n’est pas assez ! » s’emporte Chandel. Bryan confirme : « Il devrait y avoir des lois plus fermes pour punir les inégalités. » On débat aussi des rôles dévolus aux hommes et aux femmes selon les traditions et, parfois, on s’émeut : « Dites madame, les femmes qui sont seins nus [les Femen], elles ne sont pas mariées, quand même ? ! » Pour Leticia : « On descend d’une génération plutôt conservatrice, on a grandi avec des notions sexistes. C’est bien de faire un petit rappel de ce genre. » Et Yann conclut : « Ce travail est bénéfique car nous serons les adultes et les parents de demain. On apprend pour ne pas refaire les mêmes erreurs. »