André Cassou et Francis Masanès

Groupe Mouvement républicain et citoyen

Gilets jaunes : le retour de la question sociale

S

i légitime qu’elle soit, toute forme de protestation doit s’exercer dans le cadre des lois de la République. La colère contre les injustices ne justifie en rien la violence. Telle est la position que tout républicain doit tenir pour préalable. Sans sécurité toute liberté est illusoire, sans paix civile nos droits n’ont plus cours.

Mouvement social organisé à la base, hors de toute consigne politique, les gilets jaunes ont investi, depuis plusieurs semaines, les ronds-points de France jusqu’aux Champs-Élysées, à la suite des annonces de nouvelles taxes sur les carburants. La colère qu’ils ont exprimée vient de loin et révèle le profond malaise social et politique qui remonte des territoires. Malgré les violences observées, la majorité des Français continue à soutenir les « travailleurs » ne confondant pas les fâchés avec les fachos.

Quant au Gouvernement et au président de la République, ils s’empêtrent dans des erreurs de communication non maîtrisée en faisant croire à une fausse augmentation du Smic et à l'efficacité de mesures conjoncturelles, alors que la demande des gilets jaunes est de pouvoir vivre dignement de leur travail et qu'une véritable politique soit conduite contre les inégalités sociales et territoriales.

La transition écologique
La question mérite d’être posée afin de savoir sur le dos de qui celle-ci se fera. Car en définitive, les puissants n’expriment aucune solidarité envers les plus pauvres et les plus fragiles, alors qu’ils se préoccupent de la qualité de l’air et du réchauffement climatique. Sous prétexte d’écologie, le Gouvernement fait payer la facture aux retraités, aux plus modestes et à ceux qui vivent à l’écart des métropoles, obligés de prendre leur véhicule pour travailler ou pour le moindre déplacement. Or, la conscience écologique est aussi forte en bas qu’en haut, même s’il s’agit avant tout d’une question de moyens. Les catégories populaires n’ont pas spécialement envie de polluer la planète : ce ne sont pas elles qui sillonnent le monde en avion en brûlant du kérosène (50 % des vols sont effectués par 2 % de la population).

Les élites parlent de fin du monde, quand nombre de Français parlent de fi n du mois. On ne pourra pas résoudre la crise écologique sans lutter, en même temps, contre les inégalités.

Quant au Gouvernement, celui-ci doit aussi prouver qu’il se préoccupe vraiment d’écologie : un nouvel aménagement du territoire est nécessaire passant notamment par un retour massif des services publics et par l’arrêt de tous les projets de fermeture des petites lignes ferroviaires.

Ce n’est pas qu’à Paris qu’il faut manifester mais aussi à Bruxelles ou à Berlin
Le président de la République redoute davantage les amendes de Bruxelles que la colère de son peuple. Le vrai souverain n’est plus le peuple mais la Commission de Bruxelles dont le président français n’est plus, depuis Maastricht, qu’un fondé de pouvoir. Rappelons qu’en 1968, le mouvement avait débouché sur les accords de Grenelle. De tels accords sont aujourd’hui impossibles sans autorisation préalable de Bruxelles et de Berlin. Il est impossible d’impulser une nouvelle dynamique économique et sociale sans leur accord.

D’ailleurs, l’économiste Philippe Aghion, grand européiste devant l’éternel, qui a participé au programme présidentiel, a lâché le morceau en proposant de sortir provisoirement de la contrainte européenne des 3 %.

André Cassou et Francis Masanès

Groupe Mouvement républicain et citoyen